Elle veut des légendes
Sa Fabrique des légendes dialogue avec Lady Godiva ou l’arbre à loques. Tereza Lochmann s’empare du Musée de Picardie jusqu’en décembre.
19.06.2024
JDA 1086
Tout est parti de Lady Godiva on her Poney (bois gravé et lithographie, 2019). Une œuvre de l’artiste native de Prague Tereza Lochmann acquise par le Frac Picardie. Elle a chevauché jusqu’au Musée de Picardie – qui possède, lui, la Lady Godiva de Jules Lefebvre (1890) – pour l’exposition La Fabrique des légendes, présentée jusqu’au 15 décembre. Un aperçu en trois temps (Lady Godiva, les arbres à loques, les corps féminins) de cette artiste âgée de 34 ans.
Folklore
Fil rouge du voyage : les légendes, leur fabrication, leur réinterprétation. Et le travail même de l’artiste, en témoigne le segment sur les arbres à loques, perçus comme magiques et ornés de tissus. Un culte prégnant à Senarpont, dans l’ouest de la Somme. Tereza Lochmann s’est plongée dans ce folklore expressément pour l’exposition. D’où une résidence d’un mois entre Briqueterie, Frac et festival IC.ON.IC en 2023. « Nous avons renoué avec la tradition des cartes blanches », situe Maya Derrien, la commissaire d’exposition. Les productions, dont une grande gravure / sculpture, sont donc accompagnées d’un journal de résidence, puisque « les artistes ne créent pas en claquant des doigts ».
Jules Lefebvre et Tilda Swinton
L’expo met le résultat de cette commande en vis-à-vis de La Légende de saint Valery (1891), d’Henri Gambart, grande toile tout juste restaurée représentant un arbre orné d’offrandes. De même, des esquisses de Jules Lefebvre pour sa Godiva, associées à l’estampe de Tereza Lochmann (qui a plaqué sur la cavalière dénudée le visage de l’actrice Tilda Swinton en écho à un “mème” sur les réseaux sociaux), sont également ressorties des entrailles du Musée. « Les artistes héritent de l’histoire de l’art qu’ils réinjectent dans leur travail pour parler de notre société contemporaine », résume Maya Derrien. La dernière partie du parcours reprend une sélection de travaux antérieurs de Tereza Lochmann, entre un autoportrait sur le motif de la pisseuse et une estampe revisitant une figure chamanique féminine. Cette estampe est, comme sa Lady Godiva, l’impression d’une gravure sur bois, son medium de prédilection. « C’est une pratique peu choisie dans l’art contemporain, explique-t-elle. Je cherche à la remettre dans la lumière. » Mais en la modernisant. Comme une légende ressurgie de l’oubli.
Jean-Christophe Fouquet
Tereza Lochmann, La Fabrique des légendes
Jusqu’au 15 décembre au Musée de Picardie
Prochains rendez-vous :
- Coup de projecteur sur les arbres à loques le 23 juin à 14h30, 15h30 et 16h30
- Visite guidée le 29 juin à 15h