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En 1913, cette Amiénoise fut la première femme à se présenter à une élection présidentielle. Sa vie méconnue se dévoile lors d’une conférence le 18 juin.

Marie Denizard, féministe maudite © Anne-Claire Giraudet / Institut Camille-Miret

12.06.2024

JDA 1085

Marie Denizard est une pionnière du combat pour les droits civiques des femmes. En 1910, à l’âge de 38 ans, elle se présente aux élections législatives dans la première circonscription d’Amiens. Elle sait pourtant qu’elle n’est pas éligible. Sa stratégie ? S’appuyer sur un vide juridique : la loi interdit en effet aux femmes de voter et d’être élues, mais pas de candidater ! Elle fait donc campagne avec pour thèmes les convictions féministes, l’alcoolisme chez les ouvriers et les droits des enfants.

Une rue à son nom

« J’ai découvert son incroyable destin lors de mes recherches en histoire des femmes », situe Prescillia Da Silva, étudiante à l’université Gustave-Eiffel, à Paris. Cette historienne de 26 ans a beaucoup défriché et « n’a croisé le nom de Marie Denizard dans aucun ouvrage, que dans des archives en ligne ». Avec son mémoire universitaire et la conférence qui va en découler le 18 juin aux Archives départementales, Prescillia Da Silva entend « faire sortir Marie Denizard de l’oubli et, à travers elle, parler de toutes les femmes ». Un oubli contre lequel le conseil municipal d’Amiens a récemment lutté en baptisant de son nom une nouvelle voie du quartier Gare-la-Vallée.

 

New York Times

Scolarisée au lycée de jeunes filles d’Amiens – devenu le lycée Michelis –, Marie Denizard obtient même une bourse d’étude. En 1911, elle écrit au préfet de la Somme que « les Françaises ne doivent pas être imposées, un devoir devant toujours avoir pour corollaire l’exercice d’un droit ». Deux ans plus tard, elle va jusqu’à se présenter à l’élection présidentielle en réponse à une provocation d’un journaliste. On parle alors d’elle jusque dans le New York Times ! Mais la candidate doit faire face à un déferlement de haine et de sexisme. On s’intéresse à sa situation de célibataire sans enfants plutôt qu’à son programme. Pire, elle est lâchée par les féministes, qui craignent des retombées néfastes. Les événements qui suivent à partir de 1914 vont enliser davantage Marie Denizard. Alors directrice de l’édition de la Somme de l’hebdomadaire Le Cri des femmes, le commanditaire du journal ne la paie pas. Elle vit dans la précarité quand un huissier lui réclame le loyer de son logement de la rue Lavalard, dans le centre-ville.

 

Fin tragique

Inculpée d’outrages et de menaces de mort envers un homme de loi, elle est incarcérée quinze jours à Amiens, puis évacuée à Bordeaux et placée sous surveillance. Elle développe alors une forme de paranoïa et finit par être internée. C’est à l’asile de Leyme, dans le Lot (l’actuel Institut Camille-Miret), qu’elle meurt en 1959 après trente-deux ans d'enfermement. Laissant derrière elle « un héritage, entre tragédie et espoir », conclut Prescillia Da Silva.

Candice Cazé

 

Marie Denizard, première femme candidate à l’élection présidentielle

Le 18 juin, à 18h30

Archives départementales

61, rue Saint-Fuscien

Entrée libre