Une carte interactive pour découvrir Amiens à l’Antiquité et au Moyen Âge
Les archéologues de l’Inrap et d’Amiens Métropole compilent leurs données pour documenter l’évolution d’Amiens et ses environs à travers les âges. Sur amiens.fr, une carte interactive propose une synthèse de ce travail concentrée sur les époques antique et médiévale.
11.06.2024
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Amiens à l’époque gallo-romaine
Ce travail de longue haleine – et, théoriquement, sans fin – a débuté il y a deux ans. C’est un effort conjoint des équipes de l’Inrap (l’Institut national de recherches archéologiques préventives) et du service d’archéologie d’Amiens Métropole, parrainé par le Service régional de l'archéologie des Hauts-de-France, site d'Amiens. Lesquels sont d’ailleurs en train de construire un groupe de recherche commun.
De quoi s’agit-il ? De la compilation d’un maximum de données relatives à l’archéologie sur une carte interactive. Un SIG, un système d’information géographique. Une sorte « d’atlas archéologique et historique du territoire », résume Richard Jonvel, qui dirige le service archéologique d’Amiens Métropole.
Cette carte permet de créer des couches selon les époques. Lesquelles montrent les frontières, les fortifications, les faubourgs, les cimetières, les lieux publics, ceux de culte, de pouvoir, de loisirs, les évolutions des lits et bras de la Somme, les axes routiers…
L’atlas interactif ne recoupe pas les frontières actuelles d’Amiens Métropole. « Nous travaillons sur un rayon de 17 kilomètres autour d’Amiens, poursuit l’archéologue. Car c’est la distance qu’un homme pouvait parcourir en une journée en un aller-retour, et donc le rayon des principales interactions humaines sur un territoire. »
D’OÙ VIENNENT LES DONNÉES ?
L’archéologie préventive – à différencier de l’archéologie programmée, qui cible un gisement riche, parfois sur de la longue durée, comme à Boves ou à Renancourt – intervient en amont de programmes d’aménagement du territoire afin de récupérer les informations en sous-sol avant leur destruction. Née dans les années 1970, elle est désormais systématisée.
Sur le territoire amiénois, l’Inrap, la « mémoire de la ville » comme l’exprime Richard Jonvel, a longtemps géré seul la question. Puis Amiens Métropole a également mis sur pied une équipe d’archéologie préventive en 2011. Ajoutées aux résultats des fouilles programmées, les informations ainsi collectées ont ainsi explosé en une quarantaine d’années.
Mais l’archéologie existait bien avant. Sans même parler des travaux du “père de l’archéologie”, l’Abbevillois Jacques Boucher de Perthes, d’autres recherches avaient déjà éclairé le passé amiénois. Elles nourrissent aujourd’hui ce tout nouveau SIG, « notamment le fonds Charles-Pinsard, qui date de la fin du XIXe siècle et du début du XXe et est compilé en 70 volumes dans les archives des bibliothèques, ou les travaux de François Vassel, architecte de la Reconstruction à qui l’on doit la connaissance du quadrillage de l’Amiens gallo-romain ».
Mais pourquoi se lancer dans cette carte interactive aujourd’hui ? D’une part, car les outils le permettent. D’autre part, « car tout une génération d’archéologues part à la retraite. Il faut donc sauver les informations. Cette carte intègre des notices que les retraités peuvent continuer à alimenter ».
COMMENT ÇA MARCHE ?
La carte superpose les époques, mais aussi les chantiers de fouilles, lesquels sont donc accompagnés d’une notice. À terme, toutes les fouilles menées au fil des décennies devraient y être synthétisées. Du moins, dans la version grand public. Celle à destination des chercheurs se veut plus complète et technique.
C’est cette version grand public que met à disposition amiens.fr. Après avoir cliqué sur l’onglet “carte interactive”, il suffit de chercher le symbole “truelle”. Trois options – superposables – s’offrent alors : les chantiers de fouilles accompagnés de leurs notices, la carte d’Amiens à l’époque gallo-romaine (de Samarobriva, donc) et celle d’Amiens au Moyen Âge.
« Nous avons retenu l’Antiquité et le Moyen Âge car ce sont les époques les mieux documentées à l’heure actuelle, explique Richard Jonvel. Nous compilons les données et les transmettons aux collègues du SIG qui les mettent en ligne ». Philosophie : « La science ouverte à tout un chacun, pour rendre accessible le passé, donner une idée de l’ampleur de la ville, de son évolution ».
Les deux cartes, la version dédiée spécialistes et celle grand public, vont continuer d’évoluer au fil des découvertes. En attendant, on peut déjà y voir la Somme d’avant les canaux, les thermes, le théâtre antique, les deux enceintes médiévales, l’ancienne porte de la ville au quartier Saint-Pierre… Et une foule d’autres surprises ressurgies du passé.
Jean-Christophe Fouquet