Leitura Furiosa, la fureur de dire
Depuis plus de trente ans, l’association amiénoise Cardan joue les entremetteuses. La structure militante de lutte contre l’illettrisme née en 1978 organise depuis 1992 au mois de mai Leitura Furiosa, son temps fort annuel. Des rencontres à fleur de mots entre les publics fâchés avec la lecture et des auteurs. Des histoires fortes à entendre à la Maison de la culture et à lire dans le Courrier Picard le 26 mai. Rencontre avec Jean-Christophe Iriarte Arriola, coordinateur de l’association.
21.05.2024
Leitura Furiosa a fêté ses 30 ans en 2022. Comment définir cette manifestation pour ceux qui ne la connaissent pas ?
C’est une aventure. Celle de rencontres insolites entre des groupes qui n’ont jamais vu ou lu un auteur, et des auteurs qui ne sont pas habitués à travailler avec ces publics fâchés avec la lecture et l’écriture. De ces rencontres, organisées cette année le vendredi 24 mai, les auteurs et autrices invités font naître des textes de littérature contemporaine, nourris par la magie des échanges. Il s’agit d’une performance d’écriture. Les groupes assisteront le samedi 25 à leur illustration, correction, mise en page. Des lecteurs formés par le Cardan à la lecture à voix haute s’en empareront le dimanche pour les présenter sur scène à la Maison de la culture devant le public. Les textes seront publiés sur Internet et dans le cahier central du Courrier Picard également. Leitura Furiosa permet de faire entendre la parole de ceux qu’on ne voit pas.
La manifestation ne se déroule pas qu’à Amiens.
Non. Déjà, en amont, des Raffuts de lecture sont organisés depuis le 12 mai et jusqu’au 24 à Abbeville, Ailly-sur-Somme, Auxi-le-Château, Beauvais, Compiègne, Doullens… Les textes des éditions précédentes sont lus par les bénévoles, des auteurs et comédiens, d’anciens stagiaires, des lecteurs passionnés… Cette semaine, il y en a tous les soirs à 18h chez notre partenaire historique la librairie Pages d’encre par exemple. Le 24 mai, seize rencontres auront lieu dans différentes villes des Hauts-de-France (Abbeville, Amiens, Beauvais, Chaumont, Méru, Conty) et douze au Portugal - à Porto et Lisbonne - où rayonne aussi Leitura Furiosa. Des textes écrits là-bas sont traduits et lus à Amiens et inversement.
Vous sortez aussi des murs de la Maison de la culture.
Oui. L’idée est de casser les a priori et d’attirer le public vers la manifestation qui s’adresse vraiment à tout le monde. L’inauguration s’est tenue le samedi 18 chez Pages d’encre avec deux auteurs locaux, Cécile Hennerolles et Nicolas Jaillet, lors d’une rencontre-dédicaces, puis au Capuccino avec un apéro-concert. Toute la journée du 25, neuf ateliers (haiku, typo…) seront installés devant les librairies indépendantes de la ville, ouverts aux participants de Leitura Furiosa comme aux badauds. C’est aussi un moyen de faire découvrir aux publics non-lecteurs ces lieux de culture.
Qui sont les personnes qui intègrent ces groupes ?
Il y a des personnes de tous les âges, de l’école primaire jusqu’aux seniors. Elles fréquentent les structures avec lesquelles nous travaillons toute l’année : centres sociaux, Esat, collèges, lycées, l’Alco, Caps, Initi’elles, l’École de la 2e chance… Il y a des publics de langue étrangère, issus de l’immigration, des nouveaux arrivants, mais aussi des personnes en situation d’illettrisme ou éloignées du monde de la culture. Ils seront environ 120 à intégrer ces groupes dans les Hauts-de-France. Et près de 80 lecteurs à s’emparer des textes à la Maison de la culture, accompagnés par près de 40 bénévoles.
Et les auteurs ?
On essaie d’avoir de nouveaux écrivains à chaque édition. Cette année, il y a plus d’autrices que d’auteurs. Certains reviennent après plusieurs années. C’est difficile de leur dire non parce qu’ils adorent y participer mais on souhaite garder une certaine fraicheur, éviter la routine. La première participation est souvent un choc. Il y a une sorte de subjugation du côté des auteurs.
Le combat du Cardan contre l’illettrisme est toujours d’actualité.
Oui. Les derniers chiffres de l’Insee viennent de tomber. Il y a du mieux certes. L’illettrisme est passé de 7 à 4 % en France. Mais c’est une moyenne nationale. Les Hauts-de-France sont toujours la région la plus touchée.
Propos recueillis par Coline Bergeon
Cardan (71, rue Saint-Roch) : www.assocardan.org
| Leitura Furiosa, le programme • 24 mai, 18h, lecture à la librairie Pages d’encre. • 25 mai, ateliers devant les librairies indépendantes d’Amiens et 1er Amiens Finger food festival (festival où on mange avec les doigts), dès 11h30 place Léon-Gontier, en partenariat avec le lycée hôtelier La Hotoie, le Marché solAM et l’Île aux fruits. Invité d’honneur : le chef de cuisine et auteur Thierry Stasiuk. • 26 mai, dès 10h30, à la Maison de la culture : exposition des textes illustrés, ateliers (sérigraphie, typographie, écriture…), vente des ouvrages des auteurs présents, bibliothèque dans le hall, lectures dans le théâtre, repas, dédicace musicale… Gratuit – ouvert à tous 
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| Les auteurs invités en Hauts-de-France
AGGOUNE Hafid |
| Un coup de pouce pour la publication des textes Le Cardan a ouvert une souscription pour financer la publication des textes originaux de Leitura Furiosa dans le Courrier Picard du 26 mai. 
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| Une manifestation reconnue En 2022, Leitura Furiosa a été primée lors du grand prix Sofia de l’action littéraire, dans la catégorie diversité. https://www.youtube.com/watch?v=HkqKUfXS6PU
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