Notice
Alfred Manessier, "Les Hortillons au printemps"
Alfred Manessier (Saint-Ouen, 1911 - Orléans, 1993)
Les Hortillons au printemps
1979
Huile sur toile
H. 162 cm ; l. 162 cm
Inv. M.P.2011.5.1
Achat avec la participation de l’Association des Amis des musées d’Amiens, 2011
Alfred Manessier, renommé dès 1948 pour ses vitraux non figuratifs, symboles du renouveau de l’art sacré en France, est communément considéré comme l’un des maîtres de la lumière au XXe siècle. C’est enfant qu’il forme son regard au gré de la lumière changeante des paysages picards, marais et bords de mer, traversés en compagnie de son grand-père ; il écrit dans ses carnets, en mai 1980 : « La vocation d’un homme est liée – bien plus qu’on ne le croit – à la qualité de la lumière du lieu dans laquelle s’est baigné l’oeil ébloui de l’enfant. » Grand voyageur, il parcourt la Hollande, l’Espagne ou le Canada, tout en restant très attaché à sa région natale. Célèbre pour ses nombreuses compositions inspirées par la baie de Somme, aquarelles, galets, toiles ou encore lavis, il redécouvre les hortillonnages d’Amiens après le décès de sa mère en 1977.
La désignation de ces jardins flottants au milieu d’un dédale de canaux l’amène à s’interroger à l’été 1982 sur le titre donné à son tableau : « On t’a rappelé avec raison que le nom d’hortillon fut donné par les soldats romains aux jardiniers de ces lieux et que ces lieux se nomment les hortillonnages. Dans ta jeunesse on disait déjà indifféremment les hortillons ou les hortillonnages, et le titre de la toile de 1979 intitulée Les Hortillons au printemps est donc incorrect. L’incorrection restera hélas ! […] Avec excuses aux puristes picards et aux braves hortillons de ton enfance que tu as confondus avec leurs jardins. » Il ajoute en octobre 1983 : « “Hortillons” ou “Hortillonnages” peuvent se dire indifféremment pour le lieu des jardins […] : Les Hortillons au printemps est donc un titre correct. »
Ce souci d’exactitude témoigne de l’importance prêtée par l’artiste à ces lieux parcourus autrefois, désormais du domaine de l’intime. Incarnant un « paysage de mémoire », les paysages picards, hortillons et marais apparaissent sous son pinceau telles des réminiscences des jours heureux de son enfance. Utilisant des teintes originales et des effets inédits sur des toiles de grand format, Manessier transfigure la réalité du paysage représenté pour en offrir une image à la fois abstraite et sensible.
C.R.